L’Allemagne veut rapidement mettre en service des terminaux de gaz liquéfié flottants

En Allemagne, le gaz chauffe 50% des logements et représente 26,7% de la consommation primaire d'énergie.

Publié le 18/04/2022

5 min

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L’Allemagne, qui cherche à se libérer de sa dépendance au gaz russe, veut se doter de terminaux flottants d’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) pour lesquels elle a débloqué une enveloppe de près de 3 milliards d’euros, a indiqué vendredi 15 avril le ministère des Finances.

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui, avec AFP

 

« La dépendance vis-à-vis des importations russes d’énergie doit être réduite rapidement et durablement. Les terminaux méthaniers flottants y apportent une contribution importante en faveur de laquelle nous devons débloquer des fonds », a tweeté le ministre des Finances Christian Lindner. Une enveloppe d’un montant total de 2,94 milliards d’euros a été mise à disposition pour la location de ces immenses navires méthaniers, a précisé à l’AFP le ministère des Finances.

L’Europe compte sur le GNL pour s’affranchir du gaz russe

Depuis le début de la guerre en Ukraine, avec des sanctions qui devraient encore s’accentuer dans les prochains jours, l’Europe cherche à s’affranchir du gaz russe, alors qu’elle importe plus de 40 % de son gaz de Russie, principalement par gazoducs terrestres (environ 140 milliards de mètres cubes) mais aussi par bateau sous forme gaz naturel liquéfié (environ 15 milliards). Le 25 mars, la Commission européenne a annoncé avoir trouvé un accord avec les États-Unis pour livre 15 milliards de mètres cubes supplémentaire de GNL dès 2022 et augmenter cette capacité chaque année. Et si l’Europe arrive à capter cette offre supplémentaire de GNL, il faudra qu’elle soit en mesure de le regazéifier. Si la France et l’Espagne demeurent particulièrement pourvues en terminaux de regazéification, ce n’est pas le cas de l’Allemagne qui entame donc un virage énergétique et accélère considérablement ses investissements pour être en mesure de recevoir rapidement du GNL.

L’Allemagne mise le GNL à court et moyen terme

L’Allemagne aussi cherche les voies de sa diversification, elle qui a déjà réduit sa dépendance au gaz russe de 55 % (moyenne 2021) à 40 % en quelques semaines, à la fin du première trimestre 2022, au profit d’importations plus importantes des Pays-Bas, de Norvège et de GNL, selon le ministère de l’Économie. À la différence de plusieurs pays européens, l’Allemagne ne dispose cependant d’aucun terminal terrestre pour regazéifier le gaz liquéfié importé. Elle doit pour l’instant recourir aux terminaux installés dans d’autres pays de l’UE, ce qui limite ses capacités d’importation. Depuis l’invasion russe de l’Ukraine, Berlin a relancé deux projets d’installation de terminaux méthaniers l’un à Brunsbüttel et l’autre à Wilhelmshaven. Le projet de regazéification à Brunsbüttel est développé par un consortium composé de Gasunie, Oiltanking et Vopak et aurait une capacité initiale de 8 milliards de m3 par an. Le projet de Wilhelmshaven, promu par Uniper, qui devait initialement avoir une capacité de 10 milliards de m3 par an, avait été annulé en début d’année dernière. Ils ne devraient cependant pas être opérationnels avant trois ou quatre ans.

Des terminaux flottants de regazéification pour « faire face rapidement »

D’ici là, la première économie européenne, dont la puissante industrie est une grosse consommatrice de gaz, compte s’équiper de ces terminaux flottants de regazéification. Les terminaux flottants de regazéification, plus connus sous l’appellation anglaise « floating storage regasification unit » (FSRU), sont des navires pouvant recevoir du gaz naturel liquéfié transbordé des méthaniers et le regazéifier. Moins chères, plus flexibles, ces unités peuvent être déplacées en fonction des besoins et sont également plus rapides à construire qu’un terminal méthanier. Avec la guerre en Ukraine, elles pourraient se multiplier en Europe ces prochaines années pour réduire l’importation de gaz, principalement par gazoducs, en provenance de Russie. En France, un projet est actuellement à l’étude dans le port du Havre. Selon plusieurs médias allemands, le gouvernement étudie, en lien avec des partenaires privés, la location de trois, voire quatre navires qui seraient positionnés dans des ports de la mer du Nord ou de la Baltique. Une partie de ces installations pourraient être en service dès l’hiver prochain. Le ministère ne précise pas si la disponibilité de terminaux flottants est garantie alors que ces navires sont très demandés actuellement par tous les pays qui doivent réduire leur dépendance au gaz russe. Si l’Allemagne diversifie son mix, le gouvernement ne juge pas réaliste de pouvoir se passer de gaz russe avant mi-2024. Une affirmation qui va dans le sens des principaux instituts allemands de prévisions économiques qui ont annoncé la semaine dernière que le pays « plongerait dans la récession en 2023 en cas d’arrêt immédiat des approvisionnements en gaz russe ». En 2023, le produit intérieur brut de la première économie européenne reculerait de 2,2 % en cas d’arrêt des livraisons de gaz, dont l’Allemagne est particulièrement dépendante, affirment ces six organisations influentes (DIW, IFO, IFW, IWH et RWI).

Crédit : Shutterstock.