Directive gaz : le texte du compromis

Publié le 13/02/2019

6 min

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La nouvelle version du texte de la future directive gaz, présentée lundi 11 février par la présidence roumaine de l’Union européenne, a fait l'objet d'un accord provisoire hier soir au Parlement européen. Cette directive, qui doit permettre un meilleur contrôle du marché gazier en Europe, a été sujette à de nombreuses discussions dans les couloirs bruxellois ces derniers jours. En cause : la délicate question du gazoduc russe Nord Stream 2.   Par la rédaction de Gaz d'aujourd'hui De nouvelles règles établissant un cadre règlementaire clair pour les gazoducs de l’UE et de pays tiers ont fait l’objet d’un accord provisoire entre les députés et les États membres. Une refonte des règles du marché du gaz a été actée par accord informel hier soir. Les règles modifiées couvrent à la fois les gazoducs de l’UE et les gazoducs de pays tiers entrant dans l’UE, créant ainsi un cadre juridique clair pour les infrastructures existantes et à venir. La France et l'Allemagne au coude à coude Quelques jours plus tôt, et plus d'un an après une première proposition de la Commission européenne, les Vingt-Huit ont convenu d'une position commune à la faveur d'un compromis proposé conjointement par la France et l'Allemagne pour l'amendement de la directive gaz. Cette directive, perçue depuis le début comme une volonté de la Commission européenne de « mieux encadrer le projet de gazoduc Nord Stream 2 entre Moscou et Berlin » sur lequel elle n'avait pas jusque-là de pouvoir d'intervention, semble sur le point de trouver son épilogue. La France a annoncé le 7 février qu'elle soutiendrait la révision de la directive européenne sur le gaz. En coulisse, les négociations étaient déjà en cours entre Paris et Berlin pour établir un texte de compromis. L'Allemagne, qui soutient la construction du pipeline Nord Stream 2, a dû réviser sa position et accepter de se soumettre à un contrôle européen. La chancelière allemande Angela Merkel n'a pas hésité à souligner « l'étroite collaboration de la France et de l'Allemagne pour parvenir à cet accord ». Si l’amendement tel qu'il est proposé ne remet pas directement en cause Nord Stream 2, il le soumet à des contrôles stricts, voire à de possibles modifications. Si l'Allemagne a accepté le texte proposé par la France, c'est parce qu’elle deviendra de fait l'organe régulateur chargé de l’application de la directive pour le projet Nord Stream 2. Une compétence exclusive pour l'UE « Beaucoup souhaitaient voir ces négociations échouer, car sans cet accord la législation de l’UE ne pourrait pas s’appliquer aux gazoducs en provenance de pays tiers. Avec cet accord, tous les futurs gazoducs issus de pays tiers, y compris Nord Stream 2, devront se conformer aux règles de l’UE. Cela a toujours été le principal objectif du Parlement et je suis ravi que cela se confirme aujourd’hui avec cet accord avec le Conseil » a déclaré le rapporteur Jerzy Buzek. La règle selon laquelle la propriété des infrastructures de transport de gaz doit être distincte de celle du gaz s’applique déjà aux gazoducs de l’UE. Avec cette nouvelle législation, cela deviendrait une règle générale applicable à tous les gazoducs dans l’UE, même s’ils ont leur origine à l’extérieur de l’Union européenne, avec des possibilités de dérogation pour les gazoducs existants et d’exemption pour les nouveaux. Nouveaux gazoducs de pays tiers Les nouvelles règles donnent à l’UE la compétence exclusive en matière d’accord sur de nouveaux gazoducs avec des pays tiers. L’État membre où se situe le premier point d’entrée du gazoduc devra consulter le pays tiers concerné avant de décider d’une exemption fondée sur les règles de l’UE. La Commission prendra la décision contraignante d’octroyer ou non l’exemption. En cas de désaccord avec l’État membre, l’avis de la Commission prévaut. La Commission pourra aussi autoriser un État membre à ouvrir des négociations avec un pays tiers, à moins qu'elle ne considère que cela ne soit contraire au droit de l'Union ou préjudiciable à la concurrence ou à la sécurité d'approvisionnement. Avant de signer un tel accord, l'État membre devra notifier le texte de l'accord à la Commission et obtenir son autorisation pour le signer. Le Parlement européen a aussi inclus dans le texte « le fait qu’un accord entre un État membre et un pays tiers ne devait en aucun cas entraîner des retards dans la mise en œuvre de cette directive ». Les États membres auront neuf mois pour adapter leur législation nationale à cette directive. Les projets de gazoduc devront respecter les règles du marché de l'énergie de l'UE, car ils ne sont pas directement la propriété du fournisseur de gaz qui devra de son côté mettre au moins 10 % de leur capacité à la disposition de tiers. Ils devront également respecter les tarifs non discriminatoires de l'UE et leurs opérations de compte-rendu devront être rendues transparentes. « Cela rendra le cadre juridique de l'UE plus cohérent, renforcera la transparence et assurera la sécurité juridique aux investisseurs des infrastructures gazières et aux utilisateurs du réseau » précise-t-on du côté de la Commission européenne. Gazoducs existants issus de pays tiers Afin de tenir compte de l'absence de règles spécifiques applicables aux gazoducs entre les États membres de l'UE et des pays tiers, la nouvelle directive prévoit la possibilité d'accorder des dérogations aux gazoducs existants. L’État membre où se situe le premier point d’entrée pourra déroger aux nouvelles règles pour autant que cela ne nuise pas à la concurrence au sein de l’Union. Les États membres peuvent décider d’une dérogation jusqu’à un an après l’entrée en vigueur de cette directive. Si le gazoduc est situé sur le territoire de plusieurs États membres, l’État membre d’entrée devra consulter les autres avant d’octroyer une telle dérogation. Et pour la suite Après ce passage au Parlement, l’accord doit désormais être approuvé en commission d’industrie, de la recherche et de l’énergie (Itre), puis en plénière et au Conseil avec en ligne de mire une adoption rapide avant les prochaines échéances électorales. La directive entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal officiel.    

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