La Commission propose une nouvelle norme Euro 7

Publié le 12/11/2022

8 min

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La Commission européenne a proposé le 10 novembre de rehausser l’ambition des normes pour réduire la pollution des automobiles. Après avoir acté la fin des ventes de voitures neuves essence et diesel à partir de 2035, la Commission entend désormais fixer de nouvelles normes pour limiter la pollution automobile et améliorer la qualité de l’air.

Par Laura Icart, avec AFP

 

La Commission a présenté une proposition législative visant à réduire la pollution de l’air causée par les nouveaux véhicules motorisés vendus dans l’UE, afin d’atteindre les objectifs fixés dans son Green Deal avec en toile de fond l’amélioration de la qualité de l’air pour laquelle la Commission vient d’ailleurs de faire une proposition. Si les associations non gouvernementales estiment que Bruxelles ne va pas assez loin alors que la pollution de l’air est responsable de 300 000 décès chaque année, portée principalement par le trafic routier, les constructeurs qui vont devoir se préparer à la fin des moteurs à énergies fossiles en 2035 pour les véhicules neuf et donc selon eux à une « une mutation radicale et des investissements extrêmement coûteux » souhaitent éviter des  contraintes additionnelles sur les normes des moteurs thermiques qui  s’appliqueraient à partir de 2025 pour une période de seulement 10 ans.

La pollution de l’air liée au transport routier cause 70 000 décès chaque année

Le transport routier est l’un des principaux responsables de la pollution atmosphérique, en particulier dans les villes. Bien que la pollution atmosphérique due aux transports ait diminué ces dernières années à la suite de l’introduction des tests d’émissions en conduite réelle (RDE) et en raison du passage aux véhicules électriques et de l’utilisation d’autres technologies propres, trop de personnes sont encore exposées à une pollution atmosphérique excessive. On estime que l’exposition chronique à la pollution atmosphérique due aux particules fines et aux oxydes d’azote provenant du trafic routier était responsable de plus de 70 000 décès prématurés dans l’UE-27 en 2018, sur les 300 000 décès de ce type dus à la pollution atmosphérique dans son ensemble. Les personnes vivant dans des zones densément peuplées sont particulièrement touchées. Les véhicules à moteur sont une source importante de pollution atmosphérique dans les villes, avec une part majeure d’émissions de NOx et de particules fines. Le transport routier était en moyenne responsable de 39  % des émissions nocives de NOx en 2018 (47% des émissions de NOx dans les zones urbaines) et de 11 % des émissions totales de PM2.5 et PM10 en 2018.

Késako, Euro 7 ?

La norme Euro a été mise en place par l’Union européenne en 1988 pour les véhicules lourds (Euro 0 à VI) afin de limiter les émissions de polluants liées aux transports routiers. Actuellement, les polluants réglementés par la norme Euro 6 sont les oxydes d’azote (NOx), monoxyde de carbone (CO), particules, hydrocarbures, méthane et ammoniac pour les camions et les bus. Elle fixe des normes de plus en plus contraignantes pour les constructeurs, qui sont dans l’obligation de mettre sur le marché des véhicules moins polluants. La Commission a présenté jeudi la norme Euro 7 qui, selon ses calculs, réduirait de 35 % les émissions de NOx des voitures  particulières et utilitaires légers et de 56 % celles des bus et camions d’ici à 2035, par rapport à la norme précédente Euro 6. Les émissions de particules fines au niveau du pot d’échappement seraient réduites de 13 % pour les véhicules légers et de 39 % pour les poids lourds. Celles produites par l’abrasion des freins reculeraient de 27 %. « Les émissions seront contrôlées par des capteurs embarqués, ce qui facilitera les contrôles techniques et les vérifications de conformité périodiques et garantira que les émissions n’augmenteront pas de manière disproportionnée au fil du temps, même lorsque ces véhicules seront exportés vers des pays tiers » précise la Commission dans sa communication.

Que propose la Commission ?

Si les eurodéputés et les États membres de l’UE ont trouvé un accord jeudi 27 octobre sur une législation européenne qui prévoit la fin de la vente de véhicules neufs à moteur thermique à l’horizon 2035, les voitures et les camionnettes équipées d’un moteur à combustion interne commercialisées avant cette date « resteront sur les routes européennes au moins pendant encore une décennie ou plus » note la Commission, soit plus de 20 % des voitures et camionnettes et plus de 50 % des poids lourds circulant dans nos rues qui devraient émettre des polluants par le tuyau d’échappement jusqu’en 2050. En outre, tous les véhicules – électriques ou non – doivent émettre moins de polluants atmosphériques, par exemple au niveau des freins et des pneus, qui sont en passe de devenir les principales sources d’émissions de particules des véhicules. Pour les camions et les bus équipés de moteurs à combustion interne, « une autre proposition de législation visant à réduire les émissions de CO2 est encore en préparation » indique la Commission. En 2035, Euro 7 réduira les émissions de NOx des voitures et des camionnettes de 35 % par rapport à Euro 6 et de 56 % par rapport à Euro VI pour les bus et les camions. Dans le même temps, les particules provenant du tuyau d’échappement seront réduites de 13 % pour les voitures et les camionnettes, et de 39 % pour les bus et les camions, tandis que les particules provenant des freins des voitures seront réduites de 27 %.

Euro 7, première norme au monde à réglementer les particules fines

Outre les polluants actuellement réglementés, la proposition étend les limites relatives à l’ammoniac (un polluant jouant un rôle clé dans la formation du smog urbain) des camions et des autobus aux voitures et aux camionnettes. La proposition réglemente également le formaldéhyde, un gaz irritant et cancérigène, et le protoxyde d’azote pour les camions et les bus. Ce polluant, un puissant gaz à effet de serre, est réglementé pour la première fois par les normes Euro. Enfin, Euro 7 sera la première norme au monde à réglementer les particules fines (jusqu’à 10 nanomètres), les particules provenant des freins et la durabilité des batteries.  

Une proposition trop coûteuse pour les uns, pas assez sévère pour les autres

L’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) a aussitôt exprimé ses « vives préoccupations ». « Le bénéfice environnemental de la proposition est très limité alors qu’elle augmente lourdement le coût des  véhicules », a déclaré le patron de BMW, Oliver Zipse, qui préside  l’organisation. Chaque véhicule Euro 7 devra se conformer à des limites d’émission plus basses ou nouvelles (y compris pour les polluants qui n’étaient pas réglementés auparavant), à des tests où les véhicules sont conduits sur route en conditions réelles de circulation. L’exécutif européen veut doubler la période durant laquelle les véhicules doivent se conformer aux règles. Actuellement, les voitures répondant à la norme Euro 6 ne doivent respecter les exigences en matière d’émissions que jusqu’à 100 000 kilomètres ou cinq ans d’utilisation, alors que l’âge moyen des voitures en Europe est proche de 12 ans. Avec les nouvelles règles, les limites Euro 7 doivent être respectées jusqu’à 200 000 kilomètres et 10 ans d’utilisation. Cela reflétera mieux le cycle de vie normal des véhicules, y compris des véhicules d’occasion sur nos routes. De nouvelles méthodes numériques, basées sur des capteurs embarqués qui mesurent les émissions tout au long de la vie d’un véhicule doivent venir simplifier le contrôle de la conformité des véhicules aux règles d’émission. Les limites d’émissions de gaz polluants seraient abaissées significativement pour les poids lourds, mais seulement légèrement pour les voitures particulières diesel et pas du tout pour les véhicules essence qui constituent la plus grosse partie des ventes. « C’est très insuffisant. La Commission choisit de préserver les profits de l’industrie automobile plutôt que la santé des citoyens », a déploré Lucien Mathieu de l’ONG Transport & Environment qui milite pour le tout électrique.  « Le lobbying des constructeurs automobiles a fait son effet« , a regretté l’eurodéputée écologiste Karima Delli, prévoyant « des négociations âpres et  compliquées » sur ce texte qui doit encore être discuté avec les États membres  de l’UE et le Parlement.

Selon la proposition de la Commission, la date d’entrée en vigueur du nouveau règlement est le 1er juillet 2025 pour les nouveaux véhicules légers (voitures et camionnettes) et le 1er juillet 2027 pour les nouveaux véhicules lourds (camions et autobus).