Sept chiffres à retenir sur le déploiement de l’hydrogène en 2023

Publié le 30/01/2024

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France Hydrogène a présenté le 30 janvier dans le cadre du salon Hyvolution les chiffres clés du déploiement de l’hydrogène en France en 2023. Capacité de production, ambitions, emplois et flottes de véhicules : que représente la filière hydrogène aujourd’hui en France ?

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui

 

6,5 GW

En 2020, la stratégie d’industrialisation promettait un effort financier sans précédent de l’État : 10 milliards d’euros en 10 ans. Objectif : déployer jusqu’à 6,5 GW de capacité d’électrolyse et produire annuellement plus de 600 000 tonnes d’hydrogène renouvelable ou bas carbone fléchées principalement pour décarboner l’industrie et la mobilité lourde. Dans une étude publiée fin 2022, France Hydrogène estimait même pouvoir aller au-delà et dépasser le million de tonnes d’hydrogène produit en 2030. La stratégie hydrogène déployée depuis septembre 2020 « a déjà soutenu environ 300 MW de capacité d’électrolyse, tant à l’échelle locale qu’à des dimensions industrielles et devrait faire émerger plus de 2,5 GW dans les prochaines années » rappelait le gouvernement dans la stratégie française énergie et climat publiée le 22 novembre. Dans la stratégie en cours de réactualisation, le gouvernement a toutefois décidé de conserver l’objectif initial alors qu’à date un peu moins de 5 % de cette capacité (en intégrant les projets en cours de construction et les décisions finales d’investissement actées) est atteinte. La stratégie révisée évoque un chiffre de 10 GW en 2035, un volume que l’association représentante de la filière estime « être un minimum au regard des besoins volumiques en hydrogène décarboné identifiés par les filières industrielles à cet horizon ». Le principal enjeu pour les acteurs français de l’hydrogène reste de passer le cap, le seuil critique, la mise à l’échelle. « La massification de la production est le meilleur vecteur pour créer sur nos territoires un écosystème industriel à forte valeur ajoutée » indiquait à Gaz d’aujourd’hui en mars Damien Havard, président et fondateur de HDF Energy.

22  

En France, 22 usines fabriquent des équipements « clés » : électrolyseurs, piles, stations de recharge, réservoirs ou véhicules. Plusieurs usines bénéficiant d’un financement européen dans le cadre des projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) ont posé leurs premières pierres en 2023. C’est notamment le cas de HDF Energy ou de la gigafactory de piles à combustible de Symbio à Saint-Fons qui vise à produire dès cette année 15 000 systèmes à hydrogène, puis monter à 50 000 par an d’ici 2026, alors que les ventes de véhicules à hydrogène doivent encore décoller. Avec 750 salariés, c’est la plus grosse usine de piles à combustible d’Europe.

30 MW

La capacité d’électrolyse en 2023 installée en France est de 30 MW. « Ces capacités d’électrolyse correspondent à des sites de production d’hydrogène renouvelable ou bas carbone mis en service dans les territoires et aux capacités des stations de recharge avec production d’hydrogène sur site » note France Hydrogène. Plusieurs stations en France font de la production in situ : c’est le cas à Pau ou encore à Auxerre. Cette capacité est en nette augmentation puisqu’elle était de 13 MW en 2022 et de 5 MW en 2021. Si la compétitivité, clé de la demande, reste encore à trouver après deux années marquées par de très fortes hausses des prix de l’électricité, la filière française est optimiste malgré des décisions d’investissement qui peinent encore à se concrétiser faute de visibilité pour les acteurs français et européens, la dynamique de projets est, elle, bel et bien lancée « avec plus de 250 projets recensés » partout sur notre territoire, rappelait lors des Journées territoires hydrogène, France Hydrogène. En septembre, la ministre de la Transition énergétique avait annoncé une enveloppe de 4 milliards d’euros pour lancer des appels d’offre tous les ans pendant les quatre ans à venir afin de développer des producteurs d’hydrogène décarboné utilisateurs d’électrolyseurs. En janvier 2023, une étude commune de l’Office européen des brevets (OEB) et de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) sur les brevets déposés dans le monde sur les technologies de l’hydrogène montraient que l’Union européenne était particulièrement en pointe dans le secteur de la recherche. 28 % de l’ensemble des familles internationales de brevets (FBI) au cours de la période 2011-2020 dans trois segments majeurs de la chaîne de valeur de l’hydrogène (la production, les applications finales et technologies de stockage, de distribution et de transformation) viennent d’Europe, et les pays de l’Union européenne sont les leaders mondiaux de la délivrance de brevets liés à l’hydrogène, dont 11 % en Allemagne et 6 % en France.

300 MW

Si la France dispose d’une capacité effective de 30 MW, elle aurait en réalité un pipe de projets « sécurisés » indique France Hydrogène, comprenez en construction ou ayant reçu une décision finale d’investissement de près de 300 MW à la fin de l’année 2023. Très loin de son objectif à atteindre, à savoir 6,5 GW en 2030, mais dans une bonne dynamique européenne cependant puisqu’elle se place juste derrière la Suède (1 397 MW) et l’Allemagne (567 MW), selon les données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Selon France Hydrogène, « 4,45 GW de projets au stade de l’étude de faisabilité » sont identifiés. Sur la base des projets qui ont fait l’objet d’une décision finale d’investissement ou qui sont en cours de construction, la capacité mondiale d’électrolyses se situe autour de 2 GW contre 700 MW en 2022. Comme pour l’expansion des énergies renouvelables, la Chine représente à elle seule la moitié de cette capacité. Si tous les projets annoncés sont réalisés, « une capacité totale de 420 GW pourrait être atteinte d’ici 2030 », soit une augmentation de 75 % estime l’AIE dans son rapport annuel sur le marché de l’hydrogène publié en septembre 2023.

6 400 

La filière hydrogène française représente en 2023  6 400 emplois directs contre 5 800 l’année dernière et 4 500 en 2021. Selon les estimations du gouvernement, la filière hydrogène pourrait créer quelque 100 000 nouveaux emplois directs et indirects à l’horizon 2030. Une nouvelle filière qui va aussi de pair avec une transformation des compétences actuelles et un besoin de compétences encore plus spécifiques. La formation constitue l’un des cinq axes stratégiques du plan France 2030, présenté par le président de la République le 13 octobre, avec une enveloppe de 2,5 milliards d’euros destinée à structurer l’appareil de formation français autour de filières dynamiques et stratégiques comme l’hydrogène, le numérique, le nucléaire, les énergies vertes et plus globalement l’ensemble du secteur industrie. Un potentiel certain mais déjà une vraie problématique pour les entreprises : une difficulté à recruter. Et, sur le terrain, c’est déjà très concret : « plus de 80 métiers en lien direct et indirect avec l’hydrogène sont en tension sur toute la chaîne de valeurs » selon l’étude Def’Hy, publiée en septembre par France Hydrogène, l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), l’incubateur soutenu par la Commission européenne EIT InnoEnergy, Pôle emploi, le réseau des Carif-Oref et Adecco Digital France. L’étude, qui analyse la dynamique industrielle et le besoin de recrutement qui en découle, dégage « trois phases » correspondant à « des pics de recrutement ». Nous sommes actuellement et jusqu’en 2025 dans une première phase avec des besoins qui se concentrent davantage sur des ingénieurs et des développeurs d’affaires (80%) aux niveaux de qualifications élevés (bac +5), ce qui explique une tension accrue aujourd’hui sur les postes de chefs de projets, de commerciaux, de développeurs d’affaires et des techniciens de maintenance. Au fur et à mesure des années et de l’avancement des projets, du démarrage et de leurs mises en service, le besoin sera davantage tourné vers des postes de techniques, environ « 40 % » selon l’étude entre 2026 et 2028 et jusqu’à 80 % d’ici la fin de la décennie. « Plus de 340 formations liées à l’hydrogène » sont recensées actuellement en France. Une offre en pleine mutation mais qui doit toutefois « se structurer et gagner en visibilité » estime France Hydrogène.

69

69 stations de recharge sont ouvertes en France. « 197 sont en projet et devraient ouvrir entre 2025 et 2026 et près d’un millier devraient être en service à l’horizon 2030 » indique France Hydrogène. À cet horizon, 750 stations pour véhicules légers sont attendues et plus de 170 pour les poids lourds, selon une étude publiée l’année dernier par France Hydrogène et la PFA qui ont réalisé une modélisation des besoins en infrastructures de recharge hydrogène pour la mobilité terrestre en France métropolitaine à l’horizon 2030.   

1 000

La France compte environ 1 000 véhicules routiers circulant à l’hydrogène. Près de 1 300 si l’on y intègre les vélos hydrogène (300). Actuellement, 59 bus sont en circulation en France, un quasi doublement par rapport à l’année 2022 et près de 750 en « incluant les commandes fermes des collectivités et les intentions » pourraient être déployés d’ici 2026. Le marché des bennes à ordures (BOM) est également porteur dans un contexte de généralisation des zone à faibles émissions d’ici le 31 décembre 2024, France Hydrogène évoque le déploiement de 170 BOM à « court terme » contre trois actuellement en service aujourd’hui. Si trois camions hydrogène roulent actuellement à l’hydrogène en France, leur nombre va s’accélérer selon la filière, près de 400 dans les différents projets dont « 130 en cours de déploiement ou financés ». Le marché du rétrofit pourrait également permettre de développer rapidement une offre de camions hydrogène. La majeure partie des véhicules en circulation sont des voitures légères (950) dont 500 sont des taxis circulant en Île-de-France. Si l’association estime que plus de 12 000 poids lourds seront en service à horizon 2030, c’est principalement sur le secteur de la mobilité utilitaire légère que le potentiel de déploiement est le plus important puisque selon les estimations près de 50 000 VUL pourraient être en circulation en 2027. France Hydrogène estime que 177 000 tonnes d’hydrogène par an seront requises à horizon 2030, soit l’équivalent de 1,3 GW de capacité de production par électrolyse pour alimenter ce parc de véhicules. Concernant les usages dits « stationnaires », ils représentent aujourd’hui une capacité de 4,6 MW pour 85 installations en service en 2023, constitués principalement de groupes électrogènes à hydrogène.