Un premier projet de captage et de stockage de carbone lancé en Italie

En 2023, la capacité de captage annoncée pour 2030 a augmenté de 35 %, tandis que la capacité de stockage annoncée a augmenté de 70 % selon l’AIE. En conséquence la quantité totale de CO2 qui pourrait être captée en 2030 est estimée à environ 435 Mt/an et la capacité de stockage annoncée à environ 615 Mt de CO2 par an. ©Shutterstock

Publié le 10/09/2024

5 min

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La société italienne d’hydrocarbures Eni et le fournisseur de gaz Snam ont annoncé le 10 septembre le lancement de Ravenna CCS, un premier projet de captage et stockage du CO2 qui pourrait permettre de stocker jusqu’à 4 millions de tonnes de CO2 par an d’ici 2030.

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui

 

Ravenna CCS, le premier projet de captage, de transport et de stockage de CO₂ en Italie porté dans le cadre de leur joint-venture visant à réduire les émissions de CO2 industrielles, est entré ce 10 septembre dans une phase opérationnelle avec le début des activités d’injection de CO2. « Un projet d’une grande importance pour la décarbonisation est maintenant devenu une réalité industrielle » a souligné Claudio Descalzi, le PDG d’Eni.« Le piégeage et le stockage du CO2 est un moyen efficace, sûr – et désormais disponible – de réduire les émissions des industries à forte intensité énergétique dont les activités ne peuvent être électrifiées » a-t-il ajouté.

Utiliser les anciens gisements gaziers

Comme dans beaucoup de projets actuellement à l’étude dans le monde, c’est l’injection et le stockage de CO2 dans des gisements gaziers épuisés qui a été choisie pour ce projet puisqu’Eni et Snam ont réalisé leur première injection de CO2 dans une ancien gisement gazier en mer Adriatique, près de Ravenne, dans le nord-est de la péninsule italienne. La phase 1 du projet prévoit le captage, le transport et le stockage des émissions de CO₂ provenant de l’usine de traitement du gaz naturel d’Eni à Casalborsetti, dans la municipalité de Ravenne, « estimées à environ 25 000 tonnes par an » indique le communiqué. Le CO2 capté sera ensuite transporté jusqu’à une plateforme offshore par des gazoducs reconvertis, puis injecté et stocké à une profondeur de 3 000 mètres dans le champ gazier épuisé. Le projet permettrai « de réduire de plus de 90 % les émissions de CO₂ provenant de la cheminée de l’usine Casalborsetti, avec des pointes de 96 % » précisent Eni et Snam. « Un résultat remarquable compte tenu des conditions de concentration de carbone inférieures à 3 % et du faible niveau de pression atmosphérique, qui rendent la réussite encore plus difficile » selon le communiqué.

Un objectif de 4 millions de tonnes de CO2 par an d’ici 2030

Le développement du projet à une échelle industrielle au cours de la phase permettra de stocker jusqu’à 4 millions de tonnes de CO2 par an d’ici 2030. Un objectif inscrit dans le plan national intégré pour l’énergie et le climat (Pniec) de l’Italie. À titre d’exemple, la France a inscrit un potentiel de captage estimé entre 4 à 8,5 MtCO2 à horizon 2030 dans sa stratégie nationale pour la capture, le stockage et la réutilisation du carbone (CCUS) présenté en juin 2023. Notre pays a également ouvert la voie en avril au stockage carbone sur son propre sol en lançant un appel à manifestation d’intérêt adressé à tous les acteurs de la filière positionnés sur la chaîne de capture, valorisation et séquestration du carbone (CCS). « Avec la capacité totale de stockage des champs de gaz épuisés de la mer Adriatique et en fonction de la demande du marché, les volumes de CO2 capturés et stockés sous terre pourraient atteindre 16 millions de tonnes par an » précise le communiqué. Eni et Snam mènent également des études de recherche et de développement en vue d’une éventuelle réutilisation du CO2 capturé.

45 installations de CCUS en service dans le monde

Environ 45 installations commerciales sont déjà en service et appliquent le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (CCUS) aux processus industriels, à la transformation des combustibles et à la production d’électricité avec une capacité annuelle totale de captage de plus de 50 millions de tonnes de CO2. Pour la petite histoire, développer au moins 50 millions de tonnes par an de capacité de stockage de CO2, c’est justement l’objectif de l’Union européenne d’ici la fin de la décennie. Près de 10 installations de captage à grande échelle (capacité de captage supérieure à 100 000 t CO2 par an et supérieure à 1 000 t CO2 par an pour les applications DAC) sont entrées en service en 2023, notamment le projet Blue Flint pour l’éthanol, l’installation de captage de Linde Clear Lake et les premières installations de Heirloom et Global Thermostat de 1 000 t CO2 par an aux États-Unis, ainsi que quatre projets en Chine (l’installation CCUS de Jiling Petrochemical, le champ pétrolier Enping de CNOOC, la première phase du projet d’intégration CCUS de Guanghui Energy et la centrale électrique de China Energy Taizhou). Le déploiement de la CCUS « est resté en deçà des attentes dans le passé, mais l’élan s’est considérablement renforcé ces dernières années, avec plus de 700 projets à différents stades de développement » sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la CCUS, indique l’Agence internationale de l’énergie (AIE). En 2023, la capacité de captage annoncée pour 2030 a augmenté de 35 %, tandis que la capacité de stockage annoncée a augmenté de 70 %. Cela porte la quantité totale de CO2 qui pourrait être capturée en 2030 à environ 435 millions de tonnes (Mt) par an et la capacité de stockage annoncée à environ 615 Mt de CO2 par an. Si cette dynamique des annonces est positive, « elle ne représente encore qu’environ 40 % (et 60 %, respectivement) des quelque 1 Gt de CO2 par an qui sont captées et stockées dans le scénario d’émissions nettes nulles d’ici à 2050 » conclut l’AIE.