La filière électrique vent debout contre une nouvelle taxe sur les installations de production

Publié le 19/09/2024

5 min

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L’Union française de l’électricité (UFE) s’est prononcée le 18 septembre contre la mise en place d’une taxe sur les installations de production évoquée par Bercy et la baisse des soutiens à l’électrification des usages (voitures, pompes à chaleur, etc.), dans une lettre adressée au Premier ministre Michel Barnier. Quelques jours plus tôt, le ministre démissionnaire de l’Économie Bruno Le Maire avait proposé une nouvelle taxe à 2,8 milliards d’euros, comprenez une nouvelle contribution sur les rentes infra-marginales (Crim). Une annonce qui a fait l’unanimité contre elle.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Taxer les productions installées d’électricité dans l’Hexagone bien que décarbonées, ou encore réduire les soutiens à l’électrification des usages, serait un contresens pour le pouvoir d’achat des Français et la lutte contre le changement climatique », écrit la présidente de l’UFE, Christine Goubet-Milhaud, dans un courrier transmis mardi et dont l’AFP a pris connaissance.

« Le temps nous est compté »

« Notre système énergétique national et européen est à la croisée des chemins », poursuit-elle. « Le temps nous est compté et toute décision de court terme sans prise en compte des enjeux structurels [aura] des effets néfastes pour notre souveraineté, notre indépendance énergétique et pour les générations []. La réduction de notre dépendance aux énergies fossiles passe par l’électrification qui aujourd’hui peine à décoller. » La mise en place d’une nouvelle contribution sur les rentes infra-marginales (Crim) sur les installations de production ou centrales électriques dépassant 260 mégawatts (nucléaire, hydroélectricité, éolien, gaz) a été évoquée par le ministre démissionnaire de l’Économie Bruno Le Maire, lors d’une audition le 9 septembre devant la commission des finances de l’Assemblée nationale. Cette contribution sur les rentes infra-marginales des producteurs d’électricité, qui ont engrangé de juteux profits grâce à la flambée des prix de l’énergie consécutive à la guerre en Ukraine, a rapporté 400 millions d’euros en 2022, 300 millions en 2023 et devrait générer 100 millions de recettes en 2024. Cette perspective, en réflexion depuis le printemps, inquiète le secteur.

Visibilité et stabilité demandées

« Si les contraintes budgétaires s’accroissent, la loi de finances pour 2025 devra malgré tout acter des efforts nécessaires pour engager le redressement des comptes publics en cohérence avec les enjeux de financement et d’accompagnement de la transition énergétique et écologique des Français » poursuit la présidente de l’UFE qui rappelle que « seule une approche globale de la fiscalité énergétique permettra d’anticiper et préparer les évolutions du système énergétique dans son ensemble ». En début de mois, la Cour des comptes appelait également à une refonte de la fiscalité énergétique française afin notamment de la rendre plus cohérente avec les objectifs environnementaux de la France. En outre, Christine Goubet-Milhaud demande au Premier ministre, dont le gouvernement devrait être annoncé sous peu, « de la visibilité et de la stabilité », évoquant notamment une « industrie du temps long » et la problématique des « les stops and go » qui inquiètent l’ensemble des filières industrielles et énergétiques françaises. L’UFE alerte également sur les coupes présumées inscrites dans les lettres plafonds des ministères et qui amputeraient plusieurs budgets jugés essentiels pour la fédération comme le budget de Ma prime rénov’ ou encore la baisse de l’enveloppe allouée à l’électrification des véhicules (bonus automobile et leasing social) où une réduction d’un tiers du budget serait demandée.

Des acteurs vent debout

« C’est la définition même d’une taxe qui est mauvaise, un impôt de production à base étroite et à taux élevé, qui va distordre les décisions d’investissement dans un secteur qui a besoin d’investir« , déplore ainsi un énergéticien interrogé par l’AFP.  « On nous taxe alors qu’on investit dans les énergies décarbonées et la transition. C’est un contre-signal climatique, voire climaticide« , peste un autre énergéticien, qui a lui aussi souhaité rester anonyme. Agnès Pannier-Runacher, ex-ministre de la Transition énergétique et ministre déléguée à l’Agriculture du gouvernement démissionnaire, s’est elle-même prononcée contre. « Cette taxe vise une entreprise qui est 100 % publique. Donc on prend de l’argent d’un côté pour le redonner de l’autre. Ça n’a pas beaucoup d’intérêt, a-t-elle déclaré sur TF1 vendredi. C’est une taxe sur l’énergie décarbonée [], ça sert à quoi par rapport au climat ? »

Dans sa lettre, la présidente de l’UFE, qui représente les acteurs de l’ensemble de la chaîne de valeur du système électrique français (producteurs d’électricité, gestionnaires de réseaux de distribution et de transport, fournisseurs d’électricité…), rappelle également l’importance de « disposer d’un support législatif idoine pour mettre en œuvre les outils issus de la réforme du marché européen de l’électricité ».