Paris demande un décalage des sanctions et une action coordonnée au niveau européen

"Les constructeurs fermement engagés dans l'électrification des véhicules ne devraient pas avoir à payer d'amendes en 2025 » a déclaré le 3 novembre le ministre de l’Economie, Antoine Armand ©Shutterstock

Publié le 04/11/2024

4 min

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Le gouvernement français va demander à Bruxelles de décaler les sanctions visant les constructeurs automobiles européens qui n’ont pas atteint les objectifs sur les émissions de CO₂ en 2025, a annoncé Antoine Armand, le ministre de l’Économie, dans une interview aux Échos publiée dimanche. De son côté, le ministre délégué à l’industrie Marc Ferracci a défendu cette même idée dans un entretien au quotidien allemand Handelsblatt dimanche.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Il faut garder le cap de la décarbonation et l’échéance de 2035 sur la fin du moteur thermique. Mais ne nous tirons pas une balle dans le pied !« , a déclaré le ministre Antoine Armand dans les colonnes des Échos. « Si nous devons infliger des amendes gigantesques aux constructeurs parce qu’ils ne sont pas allés assez vite, la première conséquence sera d’affaiblir l’investissement et surtout de renforcer nos concurrents asiatiques. Les constructeurs fermement engagés dans l’électrification des véhicules ne devraient pas avoir à payer d’amendes en 2025 : je défendrai cette position avec Marc Ferracci auprès de la Commission et de nos homologues. »  Le ministre de l’Économie participera aujourd’hui et demain à Bruxelles aux réunions de l’Eurogroupe et de l’Écofin.

Agir de manière coordonnée, en « Européen »

Dans un entretien accordé au Handelsblatt, dans le cadre de la journée économique franco-allemande qui se tient les 4 et 5 novembre à Berlin, le ministre français de l’Industrie Marc Ferracci demande un plan de crise européen pour soutenir le secteur automobile via  un ensemble de mesures visant à renforcer à court terme la demande de voitures électriques des constructeurs européens mais évoque également des pistes pour le secteur de l’acier et de la chimie. « Ce que nous vivons n’est pas une simple crise conjoncturelle due à l’augmentation des entreprises énergétiques ou à la hausse des taux d’intérêt », a déclaré Marc Ferracci au magazine allemand, ajoutant que le « modèle européen, qui reposait sur les exportations, est désormais fondamentalement remis en question. Les Européens sont confrontés à une concurrence extraordinairement forte de la part des États-Unis et de la Chine qui respectent de moins en moins les règles de l’Organisation mondiale du commerce. Nous avons besoin d’une politique industrielle ambitieuse, aussi structurée et coordonnée que l’approche très offensive de la Chine ou des États-Unis » a ajouté le ministre français.

Paris veut que l’UE décale les sanctions prévues

Les constructeurs automobiles doivent respecter une moyenne annuelle d’émissions par voiture vendue en Europe. Cette norme dite « Cafe » (Corporate Average Fuel Economy) oblige les constructeurs à vendre progressivement des véhicules de moins en moins polluants. Elle a été globalement respectée jusqu’ici mais elle doit franchir un nouveau palier à partir de janvier 2025. Antoine Armand avait déjà indiqué que le gouvernement français « n’envisageait pas » que des constructeurs automobiles soient sanctionnés au niveau européen pour non-respect des normes d’émissions de CO₂, mais ce décalage est une nouveauté portée par le ministre au niveau européen avec Marc Ferracci. « Je n’envisage pas que des sanctions soient prononcées alors que des efforts immenses ont été effectués » par le secteur pour s’électrifier, avait déclaré M. Armand devant les professionnels réunis au Sommet de l’automobile, en marge du Mondial de Paris mi-octobre. Antoine Armand avait indiqué à cette occasion que le gouvernement explorait « toutes les flexibilités (..) en coalition avec nos partenaires européens (…) pour éviter de pénaliser nos constructeurs dans leurs investissements, justement au moment le plus crucial de leur transition industrielle« .

La plupart des constructeurs européens ont demandé à Bruxelles des mesures d’aide urgentes pour affronter le durcissement en 2025 des normes d’émissions de CO₂ qu’ils s’estiment incapables de respecter, en particulier à cause de l’érosion des ventes de voitures électriques.