Émissions de CO2, interdiction du moteur thermique : des assouplissements demandés à Bruxelles

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Publié le 11/12/2024

5 min

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Les constructeurs automobiles ont réclamé en « urgence » le 10 décembre une concertation avec la Commission européenne pour éviter d’éventuelles amendes en cas de non respect des objectifs de réduction des émissions de CO₂ en 2025 dans l’Union européenne. Ce matin, les eurodéputés conservateurs du PPE, premier groupe au Parlement européen, ont demandé un assouplissement de l’interdiction des voitures neuves équipées de moteurs thermiques dans l’UE à partir de 2035, invoquant les difficultés du secteur automobile.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Trouver une solution pour 2025 est très urgent », a insisté le patron de Renault, Luca de Meo, président de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA), le lobby du secteur. Si la Commission ne change pas de position, les entreprises auto devront provisionner « des milliards d’euros » pour se préparer à d’éventuelles amendes, autant « de ressources qui n’iront pas vers l’investissement« , a-t-il affirmé devant la presse à Bruxelles. De leur côté, les eurodéputés du PPE qui soutiennent cette de demande de report de la mise en œuvre des amendes ont également réclamé ce 11 décembre à la Commission européenne d’assouplir les règles concernant l’interdiction en 2035 de la vente de véhicules thermiques neufs. Une promesse électorale de la droite au moment des élections européennes alors que le PPE est dominé par la CDU allemande, actuellement en campagne électorale, avant les législatives prévues en Allemagne le 23 février, dans un pays où l’industrie automobile est leader mondial avec un chiffre d’affaires de plus de 436 milliards d’euros (2021), dont 274 milliards à l’export et qui détient plus de 25 % des parts du marché automobile européen selon la chambre de commerce et d’industrie franco-allemande.

Décaler la mise en oeuvre des amendes 

« Personne ne nie la nécessité de la décarbonation »du secteur automobile, mais il faut de la flexibilité », a-estimé l’actuel président de l’ACEA qui va d’ailleurs transmettre son mandat au 1er janvier 2025 au PDG de Mercedes, Ola Källenius. La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a promis fin novembre un « dialogue stratégique » sur l’avenir de l’industrie automobile européenne, sur fond d’interrogations sur les objectifs européens d’électrification des véhicules. Les constructeurs automobiles doivent respecter une moyenne annuelle d’émissions par voiture vendue en Europe. Cette norme dite « Cafe » (corporate average fuel economy) les oblige à vendre progressivement des véhicules de moins en moins polluants. Elle a été globalement respectée jusqu’ici, mais doit franchir un nouveau palier à partir de janvier, avec un durcissement des règles et des sanctions. La France, avec d’autres États membres, demande de décaler la mise en œuvre de ces potentielles amendes. Mais ce débat est « prématuré » aux yeux de la Commission européenne. « On va voir fin 2025 combien de voitures ont été vendues, quelles sont les émissions », avait indiqué un porte-parole. Selon lui la « phase très délicate » que connaît l’industrie automobile actuellement est liée à la « perte de pouvoir d’achat de la classe moyenne en Europe« . C’est une période de « défis« , mais « personne ne devrait sous-estimer la capacité de rebond des grandes entreprises automobiles d’Europe« , a-t-il nuancé, en insistant sur la « résilience » et la longévité des marques européennes historiques qui ont déjà « traversé deux guerres mondiales, une crise financière et une crise énergétique ».

Aller vers une approche « réaliste » de la transition

La défense de l’industrie automobile apparaît comme un thème porteur alors que la filière a annoncé des milliers de suppressions d’emplois ces derniers mois. Les plans sociaux concernent des constructeurs emblématiques comme Volkswagen ou Ford, mais aussi des fournisseurs comme Bosch, Valeo, Schaeffler ou Michelin. Interrogé sur ce sujet, Luca de Meo n’a pas voulu se prononcer sur cette échéance mardi, estimant que « ce n’est pas le moment de discuter de cela. Nous avons 10 ans. » Le PPE défend « une approche réaliste » de la transition verte, a affirmé l’eurodéputé allemand Jens Gieseke, en présentant à Bruxelles la stratégie de son groupe « pour sauver l’industrie automobile européenne » et ses quelque 14 millions d’emplois. Le plan, approuvé par les élus du groupe mercredi, réclame de « renouer avec la neutralité technologique« , c’est-à-dire de faire une place, même après 2035, à certaines motorisations thermiques permettant d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de CO₂ des véhicules. Une des pistes mises en avant est celle des carburants de synthèse. Une technologie controversée et encore en développement, qui consisterait à produire du carburant à partir de CO₂ issu des activités industrielles.

Du côté de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a déjà mis en oeuvre cette année une taxe supplémentaire, allant jusqu’à 35 %, sur les voitures fabriquées en Chine, après une enquête ayant démontré que ces véhicules bénéficiaient de subventions publiques.