« Il est indispensable d’investir massivement pour développer le savoir-faire industriel français et de passer la filière à l’échelle »

Publié le 30/05/2020

4 min

Publié le 30/05/2020

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3 questions à…

Fabio Ferrari, président de Symbio et vice-président de l’Association française pour l’hydrogène et les piles à combustible (Afhypac)

Fabio Ferrari, président de Symbio et vice-président de l’Afhypac, revient sur les annonces de ces dernières semaines, notamment le plan automobile mais aussi les enjeux pour structurer et industrialiser une filière française de l’hydrogène avec à la clé un transport décarboné, de l’attractivité sur nos territoires, une souveraineté et une compétitivité renforcées à l’international.

Propos recueillis par Laura Icart

 

L’hydrogène semble s’installer durablement dans le paysage énergétique français. Est-ce enfin son heure ?

Un cap a été incontestablement franchi pour l’hydrogène en France ! C’est aussi une des leçons de cette crise sanitaire qui aurait pu être un frein et qui a agi en fait comme un accélérateur. La mobilisation de 150 millions d’euros sur l’innovation et la recherche dans le cadre du plan automobile [annoncé le 26 mai par le président de la République, NDLR] est un excellent signal car la R&D est un élément clé de notre compétitivité. Aujourd’hui, nous attendons avec impatience les résultats des appels à manifestation d’intérêt (AMI) [projets innovants d’envergure européenne ou nationale sur la conception, la production et l’usage de systèmes à hydrogène, NDLR], prévus pour la rentrée. Les moyens qui seront alloués seront déterminants pour créer un écosystème industriel français de l’hydrogène et passer la filière à l’échelle. 160 projets ont été déposés dans le cadre de l’AMI et choisir ceux qui seront financés sera complexe pour les pouvoir publics : il faut à la fois éviter les redondances, permettre à chaque région de déployer des solutions hydrogène sur son territoire et créer les conditions favorables pour une production française en matière de mobilité hydrogène. Si le volume d’investissement demandé par les projets de déploiement et d’industrialisation dans le cadre de l’AMI est mis en œuvre, la filière pourra se déployer sur l’ensemble de la chaîne de valeur, de la production d’hydrogène aux véhicules, en passant par la distribution et les divers composants (piles à hydrogène, réservoirs, etc.), tout en  poursuivant les déploiements dans les territoires. Ces derniers sont nécessaires pour que les équipementiers et les constructeurs testent nos produits, étape indispensable avant de partir à la conquête des marchés à l’international.

Comment l’hydrogène peut contribuer à la souveraineté industrielle et économique de la France ?

Nous avons dans notre pays un vivier de chercheurs et de compétences, mais aussi l’écosystème industriel adéquat avec Faurecia, Symbio, McPhy, Atawey, pour ne citer qu’eux. Il nous reste à impulser la montée rapide en volume pour nous permettre d’être rapidement compétitifs, notamment face à l’Asie et particulièrement la Chine. Nous sommes en effet tous sur des petites productions à ce jour – une centaine de véhicules et une vingtaine de stations sortent chaque année –, donc sur des prix qui restent élevés. Pour parvenir rapidement à des prix compétitifs à l’international il n’existe que deux moyens : soutenir la demande en donnant des aides sur l’achat de véhicules, ce qui est fait actuellement, et surinvestir immédiatement dans les moyens de production adaptés aux grandes quantités. Telle est la « méthode chinoise », qui permet un prix de revient rapidement plus bas et une entrée rapide sur le marché. C’est cette logique qui, on l’espère, sera appliquée par les autorités dans le cadre de l’AMI. Elle permettrait de dimensionner notre appareil productif pour être tout de suite compétitif au niveau international.

Que représente aujourd’hui la mobilité hydrogène en France ?

Nous sommes actuellement dans une phase de transition. Plusieurs programmes régionaux ont été lancés, comme Zero Emission Valley (ZEV), dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Il s’agit d’un nouvel écosystème basé sur un partenariat public-privé qu’il a fallu construire et dont la pertinence est reconnue jusqu’en Chine !  Nous espérons d’ailleurs que les financements qui seront octroyés suite à l’AMI permettront d’étendre ce modèle de déploiement, notamment en Île-de-France.

Crédit : Afhypac.