Cinq points à retenir sur la stratégie pluriannuelle de financement de la transition écologique

Publié le 21/10/2024

6 min

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Le gouvernement a publié le 21 octobre lundi sa première stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique et énergétique (Spafte) à l’horizon 2030, qui prévoit une augmentation de 110 milliards d’euros d’investissements bas carbone par an en 2030 par rapport à 2021. La France, comme la plupart des pays, souffre notamment d’un déficit d’investissement privé dans la transition écologique.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Les transformations en profondeur de notre société, nécessaires à l’atteinte de nos objectifs climatiques, doivent être planifiées » indique en préambule la stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique et énergétique. Un document stratégique qui vient définir les financements dédiés à la transition écologique et de la politique énergétique en France par tous les acteurs. « La transition écologique nécessitera des investissements massifs, dont la quantification et le pilotage de la trajectoire dans chaque secteur et pour chaque acteur sont cruciaux pour l’atteinte de ces objectifs climatiques » est-il rappelé, alors que le secteur public comme le secteur privé seront largement mis à contribution ces prochaines années et qu’il faut être en mesure d’anticiper. Pour rappel, le rapport de Jean Pisani-Ferry et de Selma Mahfouz sur les incidences économiques de l’action pour le climat (2023) évalue les investissements nécessaires à la transition écologique à 66 milliards d’euros nets en moyenne par an, entre 2023 et 2030. 

Un objectif fixé à plus de 200 milliards d’euros par an d’ici 2030 

« La réussite de la transition écologique repose sur une réorientation massive des flux de financements et sur une répartition de l’effort financier entre tous les acteurs économiques » indique le document. En France, les investissements bas carbone ont augmenté au cours de la dernière décennie pour atteindre 109 milliards d’euros en 2023, concernant par exemple les véhicules électriques, le report modal, la production d’électricité bas carbone, la décarbonation de l’industrie et la rénovation énergétique des logements. Entre 2022 et 2023, les investissements bas carbone dans le transport, le bâtiment et le secteur énergétique ont augmenté de 18 milliards d’euros. En 2017, ces investissements représentaient environ 67 milliards. Ils devront augmenter « de plus 110 milliards d’euros en 2030 par rapport à 2021 [86 milliards d’euros, NDLR] et ont vocation à être notamment financés par la réorientation d’autres investissements« , précise la Spafte en présentant une palette d’outils pour le financement de la transition écologique. Ainsi, « la réussite de la transition écologique repose sur une réorientation massive des flux de financements et sur une répartition de l’effort financier entre tous les acteurs économiques », selon le document.

Un secteur privé appelé à davantage contribuer

Le secteur public « investit aujourd’hui davantage que le secteur privé en faveur de la décarbonation, proportionnellement à ses investissements totaux » indique Bercy. En 2022, il a réalisé 20 % de ses investissements dans des actifs bas carbone, principalement dans les infrastructures ferroviaires et de transports en commun urbains, contre 13 % pour le secteur privé davantage concentré dans la production d’électricité pour les entreprises et dans les bâtiments bas carbone pour les ménages. Si le secteur privé alignait sa part d’investissements bas carbone à horizon 2027 sur celle du secteur public en 2022, et que le secteur public poursuivait la hausse tendancielle de sa propre part, alors les investissements bas carbone pourraient progresser de plus 63 milliards d’euros entre 2022 et 2027. Deux scénarios sont établis. Dans le premier, où la part des ménages et entreprises atteint 20 % en 2027 et celle du secteur public 24 %, le montant des investissements bas carbone atteindrait 159 milliards d’euros. Dans la cas contraire, si la part des ménages et entreprises reste à 13 %, le montant des investissements ne serait que de 107 milliards d’euros. « Les acteurs privés représentent plus de 80 % des investissements dans l’ensemble de l’économie, ce qui leur confère un rôle clé dans la réorientation des financements vers la décarbonation » rappelle la Spafte.

34,5 milliards de dépenses « vertes » en 2025

Le document indique par ailleurs que les dépenses de l’État en faveur de la décarbonation devraient augmenter pour atteindre 39,7 milliards d’euros à l’horizon 2027, soit 12,8 milliards de plus qu’en 2023. Leur montant inscrit en projet de loi de finances (PLF) pour 2025 est de 34,5 milliards d’euros, soit une augmentation de 7,6 milliards par rapport à 2023, note-t-il. « L’augmentation de ces dépenses entre 2023 et 2027 est principalement due au dispositif de soutien aux énergies renouvelables – à travers le programme 345 finançant des charges de service public de l’énergie – dont les dépenses augmentent fortement en lien avec les volumes soutenus et la baisse des prix de l’énergie. ». Le secteur des transports représente 9 milliards d’euros de dépenses favorables inscrits en PLF 2025 principalement pour soutenir le transport ferroviaire et le développement des transports en commun. Le secteur énergie représente 7,8 milliards d’euros en PLF 2025 et soutient principalement la production énergétique renouvelable et bas carbone via les tarifs d’achats. Le secteur du bâtiment a bénéficié de 2,5 milliards d’euros de dépenses favorables à la décarbonation en 2023. Il est prévu un montant de 3,6 milliards d’euros en PLF 2025. Concernant les ressources naturelles, les dépenses favorables à la décarbonation, elles se concentrent sur les secteurs de l’agriculture et de la forêt, pour un total de 1,4 milliard d’euros en 2023, 1,9 en PLF 2025 et jusqu’à 2 milliards d’euros en 2027. Le niveau global des autres dépenses en faveur de la décarbonation est de 23,5 milliards d’euros en 2023, puis se stabilisera à 28 milliards d’euros en 2025 et 2026 avant d’atteindre 29 milliards en 2027. « Ces dépenses concernent notamment l’énergie, les transports, le bâtiment, les ressources naturelles, l’industrie ainsi que les soutiens aux collectivités territoriales » précise le document.

12 milliards d’euros pour la décarbonation de l’énergie en 2027

Les dépenses favorables à la décarbonation de l’énergie  s’élèvent à 7,8 milliards d’euros dans le projet de loi de finances 2025 et devraient atteindre 12 milliards d’euros en 2027, dont 10,6 sur le programme 345 qui finance notamment les tarifs d’achats de l’électricité renouvelable, du biogaz, du biométhane, les effacements de consommation, la production d’hydrogène décarboné, ou encore l’énergie nucléaire via le CEA. Les investissements pour la production d’énergie « ont augmenté de plus de 11 milliards d’euros entre 2015 et 2023, dont plus 6,4 milliards d’euros pour les projets d’électricité renouvelable et de plus 1,6 milliard dans les projets de biométhane et chaleur renouvelable » indique le document.

Diviser par deux les investissements fossiles

La Spafte souligne que les investissements dans les technologies fossiles « apparaissent déjà en forte baisse en France« , et devront être divisés par deux d’ici 2030, en cohérence avec les objectifs de décarbonation du pays qui vise la neutralité carbone en 2050. Une baisse principalement marquée dans les secteurs des transports et du bâtiment, passant de 97 milliards d’euros en 2019 à 74 milliards en 2022. « Cette baisse s’explique notamment par celle des immatriculations de véhicules thermiques, qui représentent plus de 70 % des investissements fossiles » indique I4CE, évoquant « les difficultés d’approvisionnement que connaissait le marché automobile en 2022 mais également le renforcement des réglementations en faveur des véhicules électriques ». À noter tout de même un rebond pour l’année 2023 avec une estimation autour de 82 milliards d’euros en lien avec la « croissance du marché automobile » selon I4CE .