La rénovation énergétique indissociable d’un niveau de performance élevé

En 2020, la France compte 4,8 millions de "passoires thermiques" classées F et G par le diagnostic de performance énergétique (DPE).

Publié le 25/03/2021

4 min

Publié le 25/03/2021

Temps de lecture : 4 min 4 min

C’est une alerte que lance aujourd’hui un collectif d’acteurs du monde économique, de l’environnement et de la précarité. Alors que la loi climat et résilience arrive dans l’hémicycle ce lundi, tous s’inquiètent des conséquences de la nouvelle définition d’une « rénovation performante » faite par le gouvernement lors de la commission spéciale et estiment que cela pourrait marquer « un profond recul » sur la rénovation énergétique des logements dans notre pays.

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui

 

C’est une définition, ou plutôt une redéfinition, qui met le feu aux poudres et a incité 16 associations, parmi lesquelles le Cler, négaWatt, Effinergie ou encore France Nature Environnement, a appelé à la mobilisation des parlementaires lors de la séance publique pour une définition ambitieuse et cohérente de ce que doit être une rénovation dite « performante ».

Une définition jugée « climaticide »

Le 12 mars, en commission spéciale à l’Assemblée, sur le projet de loi climat et résilience, plusieurs groupes parlementaires ont proposé une définition commune de la « rénovation performante », considérant qu’une rénovation est jugée performante quand celle-ci permet d’atteindre une classe énergétique A ou B du diagnostic de performance énergétique (DPE), soit une consommation moyenne de 80 kWhep par m² et par an et ainsi atteindre l’objectif fixé par la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), à savoir un parc bâti « bâtiment basse consommation » rénovation ou équivalent d’ici 2050. Une définition reprise par la convention citoyenne pour le climat (CCC), par le Haut Conseil pour le climat, mais aussi par l’Ademe et tout récemment par Olivier Sichel, directeur général adjoint de la Caisse des dépôts, dans son rapport sur la rénovation énergétique des logements. Elle n’a pas pourtant pas été retenue, au profit d’une autre définition proposée par le ministère du Logement et reprise par le rapporteur en charge du titre IV « Se loger », Mickaël Nogal, dans son amendement. « Le gouvernement fait fausse route! Il est en train de sacrifier les ambitions de la CCC sur la rénovation énergétique, ce qui aura des conséquences économiques et climatiques lourdes » soulignait ce matin, lors d’une conférence de presse organisée par le Réseau action climat (RAC), Étienne Charbit, responsable de projets efficacité énergétique au Cler, tout en indiquant que ce projet de loi était tout sauf « un changement de paradigme ».

Une rénovation au rabais ?

Une définition « aux conséquences désastreuses » estime le collectif d’acteurs, puisqu’elle conduit à abaisser, dans l’acte de rénovation, le niveau d’exigence de la performance énergétique d’un logement. Autrement dit, cette nouvelle définition conduirait « à qualifier de performantes un très grand nombre de rénovations peu ambitieuses » puisqu’elle permettrait de classer comme rénovation performante l’étiquette C (180 kWhep par m² par an), voire dans certains cas l’étiquette D (250 kWhep par m² par an), même si Emmanuelle Wargon avait précisé lors de la commission spéciale que cela concernerait in fine très de peu de logements. Un choix qui entraînerait une hausse de la consommation énergétique du parc bâti à 2050 « jusqu’à deux à trois fois plus élevée que nos objectifs, et les émissions de GES dériveront davantage encore » seon Vincent Legrand, directeur général de Dorémi. À noter que le gouvernement a également modifié les dénominations des classe DPE. La classe A est passée de « très performant » à « extrêmement performant », la B devient « très performant » et la C « assez performant ». Pour les associations, l’adoption de cette définition en l’état serait contre-productive à tous les niveaux : ne permettant pas d’atteindre les objectifs de neutralité carbone, n’incitant pas à la rénovation globale alors qu’elle est pourtant jugée comme la seule ayant un impact sur la facture énergétique et sur la santé des Français et elle enverrait un mauvais signal aux professionnels du bâtiment sur le niveau de performance à atteindre.

Les députés doivent « rectifier le tir »

« La classe politique dans son ensemble doit désormais faire preuve de courage et ne pas fuir ses responsabilités » déclare Olivier Sidler, porte-parole de l’association négaWatt pour qui la dégradation « lourde » de la performance attendue des logements rénovés est « une décision dont les générations futures risquent de payer cher l’inconséquence”. Pour la coordinatrice énergie de France Nature Environnement, il n’y a qu’une seule définition à adopter en séance publique : celle qui « fait consensus et permet l’atteinte du niveau BBC rénovation”.