Le Parlement européen inscrit un objectif contraignant de production de 350 TWh de biométhane d’ici 2030

Publié le 13/02/2023

6 min

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La commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (Itre) a adopté le 9 février une série de rapports sur le paquet gazier européen. Le Parlement a notamment inscrit de manière obligatoire un objectif de production annuelle de 35 milliards de mètres cubes de biométhane en 2030. Une nouvelle saluée notamment par l’Association européenne du biogaz (EBA) qui estime que ce choix constitue une avancée « majeure » et une « reconnaissance du potentiel » du biométhane dans la décarbonation du mix énergétique de l’Union.

 Par Laura Icart

 

Réunie le 9 février pour se prononcer sur plusieurs textes majeurs du « Fit for 55 », la commission Itre a décidé d’inclure l’objectif contraignant de 35 milliards de mètres cubes de biométhane produit chaque année à partir de 2030, soit 20 % des importations de gaz russe, proposé par la filière européenne du biogaz depuis un an et repris dans le plan REPowerEU présenté par la Commission en mai dernier.

340 TWh par an de biométhane en 2030

En 2021, la production de biométhane en Europe est estimée à 37 TWh, soit 3,5 milliards de mètres cubes, « en hausse de 20 % » selon les derniers chiffres publiés fin janvier par l’EBA. « Le potentiel est considérable » indique l’association qui attend un certain nombre de mesures pour atteindre ce facteur 10 en moins de 10 ans. Suivant les préconisations de la Commission qui prévoit de mobiliser jusqu’à 37 milliards d’euros d’ici à 2030 pour soutenir le développement de la production de biométhane, la commission Itre a reconnu la place du biométhane comme vecteur de décarbonation du mix gazier européen et a acté cela en rendant contraignant l’objectif de 35 BCM de biométhane en 2030. « Sur la base d’une estimation raisonnable et solide de la disponibilité durable des matières premières », cet objectif permettrait selon la secrétaire générale de l’EBA, Giulia Cancian, « de contribuer à renforcer notre sécurité d’approvisionnement » puisque ce volume représente selon elle « 20 % des volumes de gaz naturel importés de Russie avant la guerre en Ukraine ». Concrètement, que prévoient les dispositions adoptées par le Parlement ? Chaque pays devra mettre en place une stratégie nationale de développement du biométhane, avec des obligations de cartographie des zones ayant le plus de potentiel de production de biométhane. Ce principe rejoint pour grande partie ce qui existe déjà en France, depuis l’instauration en 2018, via la loi Egalim, du droit à l’injection. L’association européenne a salué ces nouvelles règles qui vont permettre de « d’accélérer l’intégration du biométhane dans le réseau gazier après 2025 » mais aussi de « donner de la visibilité de long terme » aux investisseurs.

Faciliter l’accès aux réseaux gaziers

Si l’EBA s’est également félicitée que le Parlement aille plus loin que la Commission sur les modalités du droit d’injection, en fixant notamment des délais pour la fourniture du raccordement au réseau demandé par les développeurs de projets, elle regrette que les dispositions spécifiques concernant les coûts d’accès au réseau pour les développeurs de projets n’aient pour l’heure pas été retenues. Même si « la possibilité d’inclure ces détails dans le texte est toujours en cours d’évaluation » nous précise-t-on du côté de l’EBA, qui note « une rédaction un peu vague » sur cette question du coût d’accès, « les autorités de régulation évaluent s’il convient d’offrir un soutien pour réduire les coûts et les frais de connexion au réseau pour les installations de production de gaz renouvelables et à faible teneur en carbone ». L’association avait plaidé pour l’introduction d’un principe de partage des coûts de connexion au réseau (capex) à l’échelle européenne. Ce principe devrait être appliqué dans tous les États membres par les autorités réglementaires nationales, qui décideraient des conditions spécifiques. « Un principe de partage des coûts avec les opérateurs de réseaux de gaz permettrait de réduire le coût d’investissement pour les producteurs de biométhane » précise l’EBA qui espère que cette question sera de nouveau discutée avec le Conseil et la Commission au début du second semestre, avant l’adoption finale du texte  prévue en fin d’année 2023.

Plusieurs autres mesures pour le gaz renouvelable et l’hydrogène

La Commission Itre a également adopté plusieurs autres mesures importantes pour le développement des infrastructures d’hydrogène et de gaz renouvelables en Europe. Elle a notamment voté pour une définition de l’hydrogène bas carbone qui le mettait au même plan que l’hydrogène renouvelable. Une demande de Paris notamment mais aussi de neuf pays européens qui sont en pourparlers actuellement sur l’intégration de l’hydrogène bas carbone dans RED III.
Dans leurs propositions, les parlementaires européens ont aussi validé la conservation du modèle du type ITO (independent transmission operator) pour les opérateurs d’hydrogène, ils ont supprimé la nécessité de séparation légale entre opérateur d’hydrogène et de gaz et ont fixé le taux de mélange maximal d’hydrogène dans les réseaux gaziers à 3 %. Un temps évoqué, l’hydrogène ne disposera pas de sa propre structure de surveillance des marchés et intégrera la structure existante, à savoir l’Entsog. À noter également que les gaz bas carbone auront à respecter un niveau de réduction des gaz à effet de serre de 70 % par rapport au seuil d’émission de 94gCO2/MJ. Enfin, le rapport prévoit également que la Commission puisse légiférer l’année suivant l’entrée en vigueur de la directive sur des mesures de réduction de l’intensité des GES des gaz consommés dans l’UE d’ici 2030.