« Nous ne produisons pas assez en France » selon François Bayrou

Publié le 15/04/2025
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Le Premier ministre a réuni mardi 15 avril plusieurs membres de son gouvernement ainsi que des parlementaires et des partenaires sociaux pour évoquer la situation budgétaire de la France alors que budget 2026 s’annonce déjà explosif dans un contexte international « tourmenté » et « incertain » et alors que Bercy a annoncé une économie nécessaire de 40 milliards pour ramener le déficit public de la France à 4,6 % de son produit intérieur brut.
Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui
« Nous n’avons pas assez de ressources parce que notre pays ne produit pas assez. Nous manquons de ressources parce que nous ne produisons pas assez pour les créer » a déclaré le Premier ministre, illustrant son propos par un PIB par habitant en France « inférieur de 10 à 15 % à celui de l’Allemagne selon les années, presque 25 % par rapport à celui des Pays-Bas et 30 % par rapport à celui des États-Unis ». « Nous sommes le seul pays de notre niveau dans l’Union européenne qui accumule un tel déficit commercial, s’élevant à 100 milliards par an. »
Réduire nos dépendances
« Sur ces 100 milliards, 40 nous sont imposés, c’est notre déficit sur le poste hydrocarbures » a poursuivi le Premier ministre, évoquant « bien d’autres postes améliorables », « il est impératif de réduire nos dépendances, agricoles, industrielles, intellectuelles, soit en produisant davantage ce que nous achetons, soit en modifiant nos modes de consommation ». « Le grand domaine de la décarbonation de nos usages et l’électrification doivent par exemple nous aider à réduire notre dépendance aux hydrocarbures importés. » En 25 ans, l’industrie est passée de 16 à 12 % de notre production. Après avoir perdu 900 000 emplois en 20 ans, la France a créé 130 000 emplois dans l’industrie depuis 2017, mais cette dynamique de réindustrialisation s’essouffle quelque peu selon le dernier baromètre publié par Bercy début mars. « Notre industrie a su se renouveler et s’emparer de sujets d’avenir, en prenant en compte les défis écologiques » a néanmoins souligné le Premier ministre, évoquant notamment l’enveloppe de plus de 54 milliards alloués d’ici à 2030 dans le cadre de France 2030 avec plus de 38 milliards déjà dépensés. « La question première de la reconstitution de notre base productive, du redressement de nos productions (industrie, énergie, agriculture), filière par filière, est un défi de plus en plus difficile à relever, mais de plus en plus nécessaire aussi », évoquant simultanément le prix de l’énergie et la crainte d’un basculement des marchés.
La guerre commerciale de Trump « des conséquences à long terme«
Le premier ministre a débuté son discours en évoquant le poids de la géopolitique mondiale qui ne cesse il est vrai de s’accentuer : « L’ouragan en marche sur la planète depuis le 24 février 2022, date de l’agression contre l’Ukraine indépendante et souveraine par la Russie de Vladimir Poutine, s’est dramatiquement aggravé », portant atteinte à l’intégrité de l’Europe et ayant provoqué une très importante crise énergétique avec des conséquences toujours bien réelles pour les ménages et les entreprises, notamment pour les industriels qui peinent à retrouver une compétitivité dans un marché ultra concurrentiel et où l’énergie coûte beaucoup plus cher qu’en Asie ou aux États-Unis. À quoi s’ajoute l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, à coup d’« America first» et de basculement des valeurs. « Le monde ébahi a vécu en direct un renversement des alliances que nul ne pouvait imaginer » a souligné François Bayrou, évoquant le choix de Donald Trump ne pas soutenir l’allié ukrainien. Un basculement idéologique mais aussi économique. « Le président des États-Unis a déclenché un cyclone dont les conséquences ne cesseront pas de sitôt. En donnant le signal de départ d’une guerre commerciale planétaire, sans avertissement, du jour au lendemain, frappant d’inimaginables droits de douane, les échanges entre les États-Unis et leurs concurrents chinois et très vite leurs plus proches alliés, les obligeant à des mesures de rétorsion en elles-mêmes dangereuses, avant des volte-face imprévisibles, des allers et des retours, ce cyclone, en quelques jours a jeté à bas le cadre même, les fondations et la charpente de notre vie économique mondiale. Les conséquences de cet épisode seront nécessairement de long terme » a notamment déclaré le premier ministre alors que le président Trump a annoncé en fin de semaine dernière une pause de 90 jours sur les droits de douane imposés, à l’exception de la Chine, qui se trouve elle taxée à plus de 110 % avec déjà des potentielles conséquences sur l’Europe qui pourrait faire face à un afflux encore plus massif de produits chinois sur son marché intérieur.
Des grands choix attendus au 14 juillet
« Nous avons décidé d’aller plus vite, de prendre les devants, de choisir un calendrier beaucoup plus ambitieux et beaucoup plus exigeant », a déclaré François Bayrou. Les « grandes orientations » et les « grands choix » pour le prochain budget de la France devraient être proposés en juillet après plusieurs temps thématiques et échanges avec les parlementaires, les territoires et les partenaires sociaux notamment via une conférence des territoires organisée le 6 mai.
« En 2027, les intérêts de la dette nous coûteront davantage que le budget aujourd’hui consacré à l’Éducation nationale » a indiqué François Bayrou, souhaitant préparer les Français à de nouvelles économies et à « sortir du piège de la dette ».