Pas de découplage des prix de l’électricité et du gaz, mais des mesures pour l’affaiblir

Publié le 15/03/2023

3 min

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La Commission européenne a dévoilé mardi 14 février son projet de réforme du marché de l’électricité. Au programme : pas de découplage des prix de l’électricité et du gaz mais plusieurs mesures destinées à l’affaiblir. La France a toutefois salué un texte qui fait la part belle au nucléaire.

Par Louise Rozès Moscovenko

 

La Commission a tranché : pas de remise en cause du « merit order » (ou préséance économique, qui permet d’établir le prix de l’électricité selon la demande et les sources sollicitées pour y répondre), demandé par la France et l’Espagne. Pour prévenir d’autres flambées des prix, la Commission européenne a misé sur les contrats de long terme. Bruxelles souhaite ainsi ouvrir et faciliter l’accès aux PPA (contrats d’achat d’électricité) pour la production d’énergies bas carbone. Des contrats qui ne sont actuellement accessibles qu’aux grands consommateurs d’énergie dans un très petit nombre d’États membres, précise la Commission. Pour ouvrir ce type de contrat à un maximum d’entreprises, des régimes de garanties devraient cependant être mis en place par les gouvernements afin de couvrir le risque de crédit de l’acheteur. 

Les CfD bientôt obligatoires pour tout soutien public ?

Autre annonce importante : les contrats pour différence (CfD), déjà largement utilisés pour les EnR, devraient être obligatoires dans le cadre de tout soutien public dans les nouveaux investissements bas carbone. Les recettes excédentaires devraient en outre être reversées aux consommateurs, qui pourraient ainsi bénéficier des bonnes conditions du marché. Proposition particulièrement satisfaisante pour Paris, la Commission a indiqué que ces CfD seront aussi applicables pour les investissements dans des centrales existantes, dans le cadre d’augmentations de capacité ou de durée de vie. Le parc nucléaire français serait ainsi inclus. 

Une négociation à venir difficile

Pour Bercy, le système actuel tel qu’il est conçu aujourd’hui est « indéfendable », alors que l’Hexagone bénéficie dans son mix électrique de près de 70 % de nucléaire, décarboné et à bas prix. Demandée depuis fin 2021 par la France et l’Espagne, la réforme a été précipitée par la guerre en Ukraine. Si la Commission vise, comme la France, l’adoption de la réforme avant l’hiver, l’Allemagne, elle, est moins pressée, son mix électrique étant plus avantagé par le système actuel. Son gouvernement avait fait savoir lors du dernier conseil informel de l’énergie à Stockholm fin février, qu’elle s’opposait à une réforme structurelle faite dans l’urgence. Une position motivée également par le fait que le pays est en train de réformer son propre marché de l’électricité.

Outre la maîtrise des prix, les objectifs climatiques sont aussi au cœur de cette réforme. « Nous devons rester alignés sur nos objectifs et, pour ce faire, il nous faudrait tripler le déploiement des renouvelables d’ici à 2030 », rappelait la commissaire à l’énergie, Kadri Simson. Mais même sur ce point, le projet de réforme ne passe pas outre-Rhin : « Les propositions de l’UE vont trop loin et interfèrent massivement avec les systèmes nationaux », a déploré Simone Peter, directrice de l’association allemande de l’industrie des renouvelables, BEE, pointant entre autres les CfD obligatoires prévus dans le texte. « Pour certains États membres, cette forme de commercialisation peut présenter des avantages. Ce n’est pas le cas de l’Allemagne. »