Un monde énergivore

Publié le 02/04/2019

6 min

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Exercice annuel par excellence, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié en mars 2019 son rapport sur la consommation énergétique mondiale et les émissions de CO2 liées à celle-ci. Décryptage. Par Laura Icart   La demande énergétique mondiale croît. L’année dernière elle a augmenté de près de 2,3 %. « Nous avons assisté à une augmentation extraordinaire de la demande mondiale en énergie en 2018, avec la croissance la plus rapide de cette décennie », a déclaré Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE. Ce constat s’explique par des besoins énergétiques de plus en plus importants, notamment en Asie. Les émissions de CO2 liées à l’énergie ont atteint quant à elles le niveau historiquement haut de 33,1 gigatonnes, soit une hausse de 1,7 % par rapport à 2017. Des augmentations partout C’est donc une augmentation générale dans tous les secteurs énergétiques en 2018 que note l’AIE dans son rapport. Sont particulièrement concernés le gaz naturel, le solaire et l’éolien. Principale responsable de cette hausse : la demande croissante d’électricité dans le monde, qui devrait bientôt représenter 20 % de la consommation finale totale d'énergie. L’année dernière, son augmentation a été à l'origine de plus de la moitié de la croissance de nos besoins énergétiques. La demande mondiale de gaz enregistre une croissance de 4,6 %. Quant à la production d'énergie solaire et éolienne, elle a progressé à un rythme à deux chiffres, en augmentation de près de 31 %. Les énergies renouvelables ont largement contribué à cette expansion de la production d’électricité, représentant près de la moitié de la croissance de la demande. Cependant, même si cette croissance est importante, elle n’a pas été suffisamment rapide pour satisfaire la demande mondiale, ce qui a également entraîné une augmentation de la consommation de charbon. La demande de pétrole a augmenté de 1,3 % et la consommation de charbon de 0,7 % - à noter qu’on observe cette dernière uniquement en Asie, en particulier en Chine, en Inde et dans quelques pays de l'Asie du Sud et du Sud-Est. Le pétrole et le charbon ont représenté ensemble le quart de la croissance de la demande mondiale. Le nucléaire a également augmenté de 3,3 % en 2018, la production mondiale ayant atteint les niveaux d'avant Fukushima, principalement en raison de nouveaux ajouts en Chine et du redémarrage de quatre réacteurs au Japon. À l’échelle mondiale, les centrales nucléaires ont satisfait 9 % de l’augmentation de la demande d’électricité. L’efficacité énergétique au point mort « L’efficacité énergétique a connu une amélioration médiocre » selon l’AIE. Si l’intensité énergétique s'est améliorée de 1,3 % l'an dernier, cela représente seulement la moitié du taux enregistré entre 2014 et 2016. Bien que l’efficacité énergétique représente toujours la principale source de réduction des émissions de dioxyde de carbone dans le secteur de l’énergie, elle enregistre en 2018 sa troisième année consécutive de ralentissement. En cause : des politiques énergétiques moins efficaces et une forte croissance de la demande dans les économies à forte intensité énergétique. Niveau historique pour les émissions de CO2 Principale conséquence de ce monde de plus en plus énergivore : l’augmentation des émissions mondiales de CO2 liées à l'énergie. Elles ont augmenté de 1,7 %, pour atteindre 33 gigatonnes (Gt) en 2018, soit un niveau historique, ce qui ne sera pas sans impact sur le changement climatique. Les émissions de CO2 liées au charbon ont dépassé les 10 gigatonnes, principalement aux États-Unis en Asie où se concentrent aujourd’hui les principales centrales à charbon, elles qui ont contribué pour plus de 0,3 °C à la hausse moyenne de 1 °C des températures mondiales depuis le début de la période industrielle. Le gaz s’impose comme l’énergie de la transition L’AIE n’hésite pas à qualifier cette année 2018 « d’exceptionnelle pour le gaz naturel » qui s’impose comme l’énergie de la transition, la seule pour le moment capable d’absorber cette hausse des consommations mondiales. La demande mondiale de gaz a augmenté à son rythme le plus rapide depuis 2010, avec une croissance de 4,6 %. Le gaz naturel est devenu le combustible de choix, enregistrant les gains les plus importants et représentant 45 % de la hausse de la consommation d'énergie. La croissance de la demande de gaz a été particulièrement forte aux États-Unis et en Chine. Les États-Unis ont connu la plus forte augmentation de la demande de pétrole et de gaz dans le monde. Sa consommation de gaz a bondi de 10 % par rapport à l'année précédente, ce qui représente l'augmentation la plus rapide depuis le début des records de l'AIE en 1971. À titre d’exemple : l'augmentation de la demande américaine l'an dernier était équivalente à la consommation de gaz actuelle du Royaume-Uni. Une demande dominée par la Chine… La Chine a connu la plus forte augmentation de la demande énergétique, avec une hausse de 3,5 % à 3 155 millions de tonnes équivalent pétrole (MTEP), la plus importante depuis 2012. Cette hausse représente un tiers de la croissance mondiale. Et la demande a augmenté pour toutes les énergies. Le gaz naturel, qui s’est substitué au charbon pour répondre aux besoins en chauffage, arrive en tête, en représentant un tiers de la croissance. En 2018, la Chine a également connu la plus forte augmentation de production solaire et éolienne au monde. Elle reste le leader des énergies renouvelables, tant pour l’énergie éolienne que solaire, suivie par l’Europe et les États-Unis. … les États-Unis et l’Inde Après trois années de recul, la demande d'énergie aux États-Unis a rebondi en 2018, augmentant de 3,7 %, soit de 80 MTEP, autrement dit près du quart de la croissance mondiale. Un été plus chaud que la moyenne et un hiver plus froid ont été à l'origine de la moitié de l'augmentation de la demande de gaz aux États-Unis, les besoins en gaz augmentant à la fois pour la production d'électricité et pour le chauffage. Troisième acteur majeur en tête de la demande énergétique mondiale, l'Inde a également vu sa demande en énergie primaire augmenter de 4 % (plus de 35 MTEP), soit 11 % de la croissance mondiale. Une croissance tirée par le charbon (pour la production d'électricité) et le pétrole (pour les transports). 2018 fut une année record pour le secteur énergétique, marquée par les aléas climatiques. Près du cinquième de l'augmentation de la demande énergétique mondiale est imputable à la demande accrue de chauffage et de climatisation, alors que les températures moyennes hivernales et estivales approchaient ou dépassaient les records historiques dans certaines régions.

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