Va-t-on vers une hausse de la fiscalité sur le gaz ?

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Publié le 13/10/2024

6 min

Publié le 13/10/2024

Temps de lecture : 6 min 6 min

C’est le feuilleton de cette fin de semaine. Le gouvernement a-t-il pour projet, en plus d’une augmentation sur les  taux de TVA des chaudières gaz, de toucher également à la fiscalité sur le gaz ? Et plus exactement le tarif de l’accise sur les gaz naturels à usage combustible (ex-TICGN) ? Depuis vendredi, les membres du gouvernement ne semblent pas être sur la même longueur d’onde et c’est donc le Parlement qui devrait avoir le dernier mot. Décryptage.

Par Laura Icart

 

Le 11 octobre, lors de sa conférence de presse, la ministre de la Transition écologique et de l’énergie Agnès Pannier-Runacher avait évoqué une possible augmentation de la fiscalité sur le gaz. « L’enjeu est également de travailler sur les niches brunes » disait-elle alors, évoquant « une hausse de la fiscalité sur les billets d’avion et sur le gaz » et mettant en exergue une ligne budgétaire (taxes aériennes et énergies fossiles) du projet de loi de finances présenté jeudi au Conseil des ministres. Ce dernier prévoit une recette de 1,5 milliard d’euros par le biais d’amendements portés par le gouvernement, dont 500 millions pourraient être directement l’effet de la hausse du tarif de l’accise gaz. Ce week-end, le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, s’est déclaré ne pas y être favorable, quand la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce 13 octobre sur BFMTV qu’« il n’y aura pas d’augmentation des taxes sur le gaz » et précisant même qu’il s’agissait « d’un arbitrage » du Premier ministre.

Késako le tarif d’accise gaz, ex-TICGN ?

Créée en 1986, la TICGN est, selon Bercy, « une taxe portant spécifiquement sur le gaz naturel due à partir du moment où le gaz naturel est utilisé en tant que combustible », prévue par l’article 266 quinquies du code des douanes. Collectée par les fournisseurs de gaz, elle est ensuite reversée aux services douaniers. Longtemps exemptés, les particuliers sont soumis à cette taxe depuis le 1er avril 2014 au même titre que les professionnels. Le montant de cette taxe est fixé chaque année dans le PLF. Depuis 2018, il s’établissait à 8,45 euros le MWh sur le gaz naturel d’origine fossile. En 2024, la TICGN  n’a pas seulement changé de nom pour devenir tarif d’accise du gaz, elle a doublé pour atteindre 16,37 euros le  MWh et avec des impacts différenciés selon le lieu et le volume de consommation qui s’avèrent importants. Selon le fournisseur Ekwatteur, à Paris, pour un volume consommé moyen annuel de 10,6 MWh, cela représentera une hausse sur la facture de l’ordre de 173 euros. À Rouen, ce sera + 135 euros pour 8 MWh et près de 125 euros à Clermont-Ferrand pour 7,5 MWh. À noter que depuis 2021, les ménages qui choisissent des contrats incorporant du biométhane ne bénéficient plus d’une exonération de la TICGN, ce que la filière gazière française dénonce dans chaque projet de loi de finances, et cette année ne fera pas exception à travers des amendements demandant une exonération de cette taxe pour les consommateurs de gaz verts. « Les consommateurs souscrivant à des offres de biométhane devraient être exonérés du tarif d’accise sur le gaz » indique à Gaz d’aujourd’hui Max-Erwann Gastineau, directeur des affaires publiques à France gaz. « Ils font déjà le choix d’une énergie plus chère et soutiennent par ce biais le développement d’une énergie renouvelable et locale produite sur nos territoires. »

Le running gaz gouvernemental

« Il est surtout important d’éviter que des politiques publiques et de l’argent public rendent les solutions carbonées moins chères que les solutions décarbonées » a souligné Agnès Pannier-Runacher alors que l’augmentation de la TICFE annoncée par le gouvernement il y a plusieurs jours a déjà fait grand bruit, soulevant un tollé du côté des acteurs du secteur mais aussi des groupes politiques. « Au moment où l’on interroge chaque ligne de dépenses, nous allons travailler à réduire les avantages historiques concédés à certains usages fossiles, même s’il faut évidemment le faire avec pragmatisme et sans brutalité » a déclaré la ministre avant d’annoncer « par voie d’amendement gouvernemental une hausse de la fiscalité sur les billets d’avion et sur le gaz ». Dans le projet de loi de finances, une ligne budgétaire prévoit une hausse des recettes de 1,5 milliard d’euros, « avec des mesures par amendement sur les billets d’avions et les énergies fossiles ». Si Bercy avait précisé dès jeudi soir qu’il envisageait de présenter une taxe sur les billets d’avion, avec à la clé une recette d’environ 1 milliard d’euros, la deuxième partie sur les énergies fossiles a été précisée par Agnès Pannier-Runacher évoquant visiblement une hausse de la fiscalité gaz qui serait portée par un amendement du gouvernement. Cependant, dès samedi sur TF1, le ministre du Budget, directement rattaché à Matignon, affirmait que le projet de loi « ne contient pas de hausse de fiscalité sur le gaz » et qu’il n’y était « pas favorable« . Sur BFMTV ce dimanche, la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré que « cette augmentation des taxes sur le gaz n’aurait pas lieu », soulignant que cette taxe avait « doublé au 1er janvier 2024 » et que le Premier ministre Michel Barnier ne souhaitait visiblement pas aller plus loin sur cette question. « Si l’on augmentait à nouveau cette taxe, ce sont les Français qui paieront de plein fouet l’augmentation de cette taxe » a ajouté Maud Bregeon.

Mais si le projet de loi de finances ne mentionne effectivement pas une hausse explicite de la fiscalité du gaz et du tarif d’accusé gaz plus précisément, rien ne dit que ce ne sera pas le cas puisque c’est bien in fine au Parlement que le débat aura lieu. Et si cette question n’est pas directement portée par le gouvernement, elle pourrait très bien l’être par les parlementaires.