ZFE : le gouvernement va proposer de recentrer l’obligation autour de Paris et Lyon

Publié le 04/04/2025
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Le gouvernement a indiqué à l’AFP le 3 avril qu’il allait proposer de conserver une obligation a minima pour les agglomérations parisienne et lyonnaise alors que les zones à faibles émissions, plus communément appelées ZFE, ont été supprimées lors de l’examen en commission du projet de loi simplification la semaine dernière.
Par la rédaction, avec AFP
Les ZFE sont un « dispositif qui a fait ses preuves » dans la lutte contre la pollution de l’air, selon le cabinet de la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Le gouvernement va déposer un amendement pour rétablir dans le texte une version modifiée de ces fameuses ZFE. Initiées en 2019 et étendues en 2021, elles affichent l’objectif d’améliorer la qualité de l’air et de limiter les émissions de particules fines, responsables de maladies respiratoires et de 40 000 décès par an selon Santé publique France, en excluant certains véhicules en fonction des vignettes Crit’air. Actuellement, elles limitent la circulation des véhicules Crit’air 3, des voitures diesel immatriculées avant 2011 et voitures à essence immatriculées avant 2006. Mais des politiques de tous bords leur reprochent d’exclure des catégories de population ou de pénaliser des ménages modestes.
Les ZFE passées à la trappe en commission
Lors de l’examen en commission du projet de loi simplification, les députés ont adopté, contre l’avis du gouvernement, des amendements identiques de LR et du Rassemblement national, avec certaines voix des groupes macronistes, Horizons et des indépendants de Liot, et l’abstention de plusieurs députés de gauche. L’objectif visé est noté « louable (mais) les ZFE exacerbent les inégalités sociales en pénalisant les ménages à revenus modestes (…) contraints de choisir entre des coûts supplémentaires importants pour acheter un nouveau véhicule propre ou renoncer à se déplacer », a critiqué Ian Boucard (Droite républicaine) au nom de son groupe. « Elles sont inutiles pour améliorer la qualité de l’air et créent une forte blessure sociale, un séparatisme territorial », a avancé Pierre Meurin (RN) également auteur d’un amendement. Dans les faits, plusieurs études montrent que les ZFE ont permis une réduction significative des émissions de NO₂ (un des polluants les plus problématiques dans les zones urbaines) et des particules fines (PM10, PM2,5), comme à Paris où l’instauration de la ZFE a permis de réduire les concentrations de NO₂ de près de 10 % dans certains quartiers, ou en Espagne, dans des villes comme Madrid où les ZFE ont permis de réduire la pollution de l’air de 15 % sur les zones concernées. Une étude menée par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) estime qu’en France, les ZFE pourraient contribuer à « éviter près de 1 000 décès prématurés par an liés à la pollution de l’air ». La réduction des polluants pourrait également diminuer de 5 à 10 % les maladies respiratoires dans les zones à forte concentration de trafic.
Une suppression à 3 milliards
Supprimer les zones à faibles émissions, comme le demandent des députés, pourrait coûter à la France plus de 3 milliards d’euros d’aides européennes, selon une note de la direction générale du Trésor. Pour le cabinet du ministère de la Transition écologique, joint par l’AFP, ces discussions sur la suppression des ZFE « envoient un signal politique négatif » qui pourrait « remettre en cause les subventions déjà obtenues » pour leur mise en place. Selon la note du Trésor citée par le média Contexte, cette suppression exposerait la France « à un risque de remboursement pouvant aller jusqu’à un milliard d’euros« . La Commission européenne pourrait par ailleurs « considérer cette suppression comme une annulation d’engagements, ce qui mettrait en péril les prochains paiements » de l’UE dans le cadre du plan national de relance et de résilience (PNRR) de la France, selon le cabinet de la ministre Agnès Pannier-Runacher. Ce plan permet à la France de recevoir 40,3 milliards d’euros de subventions européennes jusqu’en 2026, « à condition de respecter certains engagements ». Pour 2025, la France doit recevoir à ce titre 3,3 milliards d’euros. Or, parmi les buts affichés du PNRR, l’adoption de la loi climat et résilience votée en 2021 (où figure la mise en place des ZFE) et la réalisation d’études préalables à la mise en place des ZFE dans 18 agglomérations sont deux objectifs clés pour prétendre aux aides européennes. Le respect par la France de l’objectif de réaliser des études préalables aux ZFE est en cours d’évaluation à Bruxelles, pour permettre un versement des fonds communautaires en 2025.
Obligatoires seulement pour certaines zones en dépassement régulier
Lors de l’examen dans l’hémicycle, qui doit démarrer mardi 8 avril, la ministre proposera de ne les rendre obligatoires que pour des agglomérations qui dépassent des seuils réglementaires de qualité de l’air pendant trois années sur les cinq dernières années, selon l’amendement consulté par l’AFP. Une mesure qui aurait pour effet de cantonner à ce stade l’obligation aux agglomérations parisienne et lyonnaise, selon le cabinet de la ministre. L’amendement supprimerait l’obligation d’en instaurer dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, laissant la main aux élus locaux. « Nous souhaitons conserver une base légale pour que les collectivités qui souhaitent continuer à en mettre en place puissent le faire simplement », a expliqué le cabinet. L’amendement prévoit également d’assouplir le cadre d’application et notamment les exceptions déjà prévues, en prévoyant que l’étude préalable à l’instauration d’une ZFE puisse permettre des dérogations basées sur des facteurs comme la « qualité du réseau de transports en commun », ou « la présence d’axes de contournement ».
Agnès Pannier-Runacher a proposé en parallèle l’organisation d’un « Roquelaure de la qualité de l’air », courant avril, pour « réunir les élus des territoires où la qualité est significativement en deçà des recommandations » de l’OMS et « améliorer les dispositifs existants« .